Patrick Arlettaz, après la première victoire de l'USAP ce samedi : « Ce n’est pas une finalité »
L’entraîneur catalan Patrick Arlettaz veut voir plus loin que le premier succès des sang et or à Montpellier.
Ce dimanche, midi. Au lendemain d’une victoire « historique » à Montpellier (10-28), les joueurs de l’USAP quittent le centre d’entraînement du Parc des Sports, laissant l’entraîneur Patrick Arlettaz répondre à nos sollicitations entre deux vidéos sur Agen, le prochain adversaire des Catalans, samedi à Aimé-Giral.
Nouveau discours, refus du fatalisme
« Oui, le discours n’est plus le même, il est moins fataliste. Quand on parlait de libération, on avait un discours où on s’énervait un peu trop, par refus de la défaite. Maintenant, on accepte moins notre condition (de lanterne rouge) comme quelque chose de rationnel. Si tout était rationnel en sport… On n’a pas eu de discours clé si vous voulez tout savoir mais, lundi dernier, on a fait une belle opposition où on s’est dit “tant pis si on a des blessés, si personne ne croit en nous…” Le côté “groupe qui vit bien” avait basculé dans le côté “trop copain”. Mais être copain ce n’est pas toujours se dire des choses agréables, c’est aussi se rentrer dedans. Or, on avait sombré dans le côté “on est suffisamment grand pour connaître nos responsabilités sans avoir besoin de se le dire.” Il fallait aussi savoir se dire quand ça déconne. Il y a eu une prise de conscience de tous les joueurs. »
Défense de fer, maîtrise tactique
« La défense participe à ce que je viens de dire. Pour bien défendre, il faut du caractère, de la dureté au placage, refuser la fatalité. Ça faisait un moment qu’on avait progressé là-dessus, même si ça ne se traduisait pas en termes de résultats. Tactiquement, on a bien mené le match. Là aussi, on le travaille depuis longtemps. On a mieux géré parce qu’on a mis les ingrédients qu’il fallait, sans sortir de nos principes. Je reviens au fatalisme : lors des matches précédents, il y avait toujours deux, trois actions où on se disait : “******, ce n’est pas possible de faire autant de fautes bêtes, d’avoir autant de malchance.” Sauf qu’à Montpellier, ça a tourné. Les joueurs l’ont senti dès le premier essai de Pujol (6e minute), qui nous a envoyé le message suivant : “Nous aussi on peut marquer sur la première action.” Toute l’année, on a galéré pour marquer, tout était compliqué, sans doute parce qu’on ne faisait pas les choses qu’il fallait. En général, c’était nos adversaires qui marquaient des essais comme dans du beurre. Je crois que cet essai a produit un déclic dans la tête des joueurs. »
Constance au rendez-vous, sérénité sous la pression
« Être plus constant, ça faisait aussi partie de mes discours. À Montpellier, notre match a été très abouti, même si les matches précédents avaient montré du mieux à ce niveau. On a eu une meilleure gestion de nos temps faibles quand on était pris dans notre camp, on a su inverser la pression avec du jeu au pied. Sincèrement, ça fait un moment qu’on essaye de faire ça, mais là, ça a été bien fait au bon moment, sans affolement. Il y a eu cette forme de sérénité qui nous manquait depuis début de saison.»
Équipe new-look, concurrence accrue
« Cette victoire redistribue fatalement les cartes. Ceux qui ont joué à Montpellier ont marqué des points, c’est sûr et certain. Après, c’était une équipe new-look dans sa composition mais pas dans les joueurs utilisés puisqu’il n’y avait que trois recrues dans le XV de départ. Avant le match, j’avais insisté sur la notion de page blanche. Personne n’avait du crédit, tout le monde repartait de zéro, c’était maintenant que ça allait se jouer. Bon, maintenant, la vérité d’un match n’est pas la vérité d’une saison. De très bons joueurs étaient absents et réintégreront l’équipe, c’est la loi du haut niveau. »
Déblocage mental, confirmation attendue
« Gagner un match est une grosse libération. On n’est pas soulagé, on est juste heureux de voir enfin des sourires à la fin d’une rencontre, de voir que le travail paie et de vivre la semaine qui arrive avec un peu plus de sérénité. Mine de rien, le fait de se dire qu’on peut exister à ce niveau, qu’on peut gagner des matches, que c’est possible, c’est une donnée nouvelle, même si ça ne suffit pas. Ce matin (hier), j’ai senti des joueurs fiers de leur victoire, surtout à l’extérieur dans un derby, mais à leurs yeux il ne s’agit pas d’une finalité. Il faut que ce soit le commencement de quelque chose. »
Calendrier décisif, Aimé-Giral en furie
« On est conscient qu’il faut enchaîner les victoires. Le match de samedi (USAP-Agen, 18h30) sera vraiment déterminant. Depuis le début de saison, on a vécu des moments très durs et, le grand mérite de ce groupe, est de n’avoir rien lâché. J’entendais les spécialistes rugby qui étaient étonnés de voir que ce groupe-là ne s’était pas délité, qu’il y croyait toujours, qu’il combattait à tous les matches. On peut être fier de ça. C’est aussi la victoire du public, à qui je tiens à rendre hommage. Ce n’est pas simple de supporter une équipe qui perd et d’avoir la tête au fond du seau tous les lundis. Nos supporters, qui ont reconnu nos qualités morales, ont enfin été payés en retour. Maintenant, avec nos armes et nos limites, on n’a pas envie de s’arrêter là. On ne va rien lâcher, même si on est les seuls à y croire. Ce ne sont que des mots, mais hier (samedi), il y avait des actes sur des mots, c’est ce qu’il y a de plus fort dans notre sport. »