On arrive surtout à la fin d'un truc qui dure depuis dix ans environ et qui nous conduit droit dans le mur.
Fin des années 90 et début des années 2000 il y avait déjà des mécènes plus ou moins proches du rugby et qui avaient, en partie, une approche sentimentale (Fabre à Castres, Martinet à Bourgoin, Kampf à Biarritz, Michelin à Montferrand) que purement financière.
Puis Canal + a fortement appuyé pour ne plus retransmettre du rugby comme à l'époque mais rentabiliser un véritable spectacle. La chaine a surfé sur la vague Stade Français avec toutes les transgressions qui l'accompagnaient (Dalida, lobby gay, danseuses du crazy horse, match accessoire du spectacle). Ils ont même voulu nous inventer un "clasico" contre le Stade Toulousain. Le supporter était devenu un ringard alors que le spectateur/client s'émerveillait de cet univers totalement factice: peu de monde se demandait pourquoi il y avait 5000 personnes à Jean Bouin et 80 000 le week-end suivant à Saint-Denis. Nous n'avions plus le droit de faire la Bronca, il fallait rentrer sur le terrain en se donnant la main, le rugby du Sud-Ouest c'était la honte, les places pour les phases finales devaient être réservées pour les partenaires et nordistes potentiellement intéressés...
Ca a commencé à intéresser du monde, notamment Boudjellal qui, s'il est réellement passionné de son club, a pris le relais du "vertueux" Maxou. Cette fois-ci, on est passé dans le tout pognon décomplexé, l'injure, la remise en cause de toutes les valeurs et règles en vigueur par pur opportunisme. Il a voulu faire sauter le système et il y est arrivé avec l'appui de médias particulièrement friands de ses excès. On a continué à promouvoir un rugby hors-sol: un coup je joue au Mans, à Nice, à Marseille, à Bruxelles... On a banalisé la star sudiste en même temps que le XV de France déclinait, on nous a reproposé des provinces, une véritable NBA du rugby avec spectacle pyrotechnique !
Cette bulle spéculative est en train d'exploser: Toulouse n'arrive plus à maintenir le rythme, Toulon réduit la voilure, le Stade Français a toujours été un club structurellement déficitaire.
Nous avons maintenant un Altrad qui licencie à la moindre contrariété et qui mélange les genres (j'ai un club en France, un autre en Angleterre, une moitié d'effectif d'Afrique du Sud, un stade à mon nom, un sponsor sur le maillot de l'équipe nationale) face à un Lorenzentti qui décide d'annuler un club rival et de continuer ses investissements immobiliers sous couvert de "valeurs du rugby" (le rêve, un stade dont une tribune est composée d'un écran géant qui retransmet les images que le spectateur a déjà sous les yeux !).
En attendant les affluences baissent et le plafond de popularité que l'on croyait extensible a été atteint et ce n'est pas le jeune cadre dynamique qui allait voir l'ange porteur de ballon au Stade de France qui va se soucier de la bonne santé du rugby français. Ce qui est paradoxal, c'est qu'un des fossoyeur du rugby, le brave président de la FFR, se fasse désormais le défenseur de la base silencieuse, du supporter de base méprisé jusque là. Quand il faut remettre au pot on sait toujours vers qui se tourner.
Heureusement que La Rochelle nous donne encore un peu le sourire dans cette ambiance morose.