Le coach de l’USAP s’est livré sur l’évolution du club catalan.
Mardi, Aimé-Giral. L’entraînement fini, le coach Patrick Arlettaz s’assoit dans la tribune Vaquer. Comme un catalan lambda, il contemple d’en haut le pré usapiste. À défaut de rabâcher sur une saison dont tout le monde veut se débarasser, les questions portaient plutôt sur celles à venir (il est sous contrat jusqu’en 2022). L’accent était mis sur la catalanité, thème cher au Cabestano-Hippolytain.
Il y a quelques semaines Perry Freshwater a annoncé changement cet été. À quoi faisait-il allusion ?
C’est un secret de polichinelle, on a trouvé un manque de la part des joueurs d’agressivité sur certains matches. Or le club s’est construit là-dessus. On a construit pendant deux ans et demi sur la confiance et le jeu. On l’a voulu, on a rencontré le succès là-dessus. Il n’y a pas de reproches à faire. Maintenant il est temps d’attaquer une autre phase, de mettre au service de ce jeu-là une plus grande implication en défense. Gérald (Bastide, nouvel adjoint) va nous servir aussi. Il faut se forcer à se faire beaucoup plus mal dans notre façon de travailler hebdomadaire pour pouvoir se faire plus mal le week-end. Ça ne veut pas dire qu’on va se cracher dessus, se faire la gueule, tabasser, mettre des claques. Non. On a été sur de la confiance, on va être beaucoup plus sur de l’exigence et de la concurrence.
Pérenniser le côté catalan
Arrivée de Gérald Bastide, promotions de Bruno Rolland et David Marty : l’USAP revient-elle aux Catalans ?
Pour moi c’est une nécessité absolue. L’USAP a une image très forte là-dessus et si on veut la véhiculer, le mieux est de prendre des gens qui l’ont vécu de l’intérieur. Ça ne veut pas dire qu’un Catalan est meilleur que quelqu’un qui vient de l’extérieur. Mais à partir du moment où on a les ressources internes, c’est quand même bien de mettre des gens qui sont au courant de notre problématique usapiste. J’ai l’impression quand même que quand on est Catalan on est les seuls à trouver qu’on n’est pas si cons que ça. Je ne blague pas. On fait l’effort naturellement d’aller vers les gens parce qu’on considère qu’ils peuvent comprendre. La moitié de la France nous croit trop cons pour nous expliquer des trucs. Si on peut pérenniser le côté catalan, et pas le côté consanguin, pour être au courant de toutes les problématiques du club, c’est un plus pour que la construction se passe bien.
On a perdu ce sentiment que l’institution était plus forte
Dix ans après le Brennus, l’USAP essaie-t-elle de recréer son identité ?
Qu’en 2009 ils aient remporté ce titre parce qu’il y avait beaucoup de Catalans, oui je le crois. Ça s’est cassé pour des raisons multiples. Néanmoins, on ne le fait pas par copie de 2009 mais par croyance. Si on veut copier un modèle à la limite, c’est le modèle toulousain. Pas avec la même philosophie, mais avec une identité de club. Je crois beaucoup au pouvoir de l’institution et c’est quelque chose qui s’est perdu à l’USAP. On a perdu cette espèce de devoir, le sentiment que l’institution était plus forte. Mais on l’a perdu depuis plus longtemps que 2009 j’ai l’impression. L’USAP est au-dessus de tout le monde pour moi. Et il faut des gens de l’intérieur qui sont au service de l’USAP, qui la connaissent, l’aiment, qui veulent la servir et pas se servir d’elle. Ma génération n’a pas réussi à avoir de titre, mais j’ai été fier de 2009. Ce n’était pas cette génération qui était championne, c’était l’USAP. J’y ai joué, une partie de moi était championne avec eux. Bien évidemment, le mérite leur en revient et je les respecte énormément pour ça. Je suis attaché à ce qu’il y ait des Catalans qui entourent l’équipe première, qui fasse passer des messages pour savoir ce qu’est l’USAP, que ce n’est pas un club comme un autre. Pas loin, on dit plus qu’un club. Moi je le considère pour l’USAP.
Y a-t-il trop d’étrangers dans l’équipe pour que des Catalans émergent ?
C’est une problématique de notre championnat. Je ne considère pas qu’il y a trop d’étrangers en France. À partir du moment où des étrangers viennent avec des qualités supérieures, les joueurs d’ici pourront parfaire leur formation. Je le redis, le rugby est fait de variété. La mentalité des îliens qui viennent ici sert à parfaire la formation de nos joueurs. Il ne faut pas faire du tout étranger et oublier les joueurs d’ici. Mais il faut arrêter, ceux qui n’y jouent pas n’ont pas le niveau. Il y a un ou deux cas où on peut avoir des avis différents entre moi et le mec qui est au rang B de la tribune Chevalier et je le comprends, et c’est peut-être lui qui a raison. Mais ça se joue sur un joueur et demi.
"Ça serait dramatique si cette saison-là ne servait à rien, répond le coach à la question : qu’avez-vous appris sur vous-même cette saison ? La plus grande faute qu’on ait faite c’est qu’on pensait qu’on allait être à la rue en termes de jeu et qu’on a été à la rue en termes de qualité individuelle, agressivité. On a eu peur de la vitesse et de la production de jeu. C’est sur autre chose qu’on s’est fait punir. Ça a changé tout le monde, moi le premier. C’est une saison qui laisse des traces, qui marque. Ça m’a creusé. C’est pas simple. C’est une saison pas facile à faire, assumer, garder le groupe, continuer à combattre. Il y a du Cyrano de Bergerac dans ce qu’on fait cette année : il finit pauvre, non-populaire et meurt tout seul. Pas simple comme vie. Il faut que ça nous apprenne et -avec la célèbre phrase qui veut rien dire - ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, qu’on montre qu’on n’est pas mort. On est condamné à être plus fort."
Il y a du Cyrano de Bergerac...
David Marty a "un destin pour entraîner"
"Zaza (Marty) a sans doute un destin pour pouvoir entraîner l’équipe première un jour. Je lui souhaite. Des joueurs emblématiques qui connaissent ce club, l’aiment et veulent le voir progresser, on peut les aider à parfaire leur formation pour qu’un jour ils amènent leur pierre à l’équipe première." Entraîneur des arrières en Espoirs, David Marty est amené à prendre plus de responsabilités dans la formation.