De l'avis d'un vigneron de Bandol, "on fait du rosé pour les touristes. En Provence, c'est le rouge la tradition".
De plus, le rosé de Provence, c'est le genre de vin qu'on ne boit qu'avec des glaçons, car gastronomiquement et aromatiquement parlant, ça ne vaut pas grand chose. Exception faite du bellet, par exemple.
Trêve de plaisanterie. Le plus gênant dans cette affaire, ce n'est pas tant le fait que le rosé de Provence soit bon ou pas. C'est que depuis plus de 10 ans, l'Usap s'est fait le fer de lance de la catalanité. Ne cessant de mettre en avant notre culture pour assurer une promotion "terroir", "authentique", presque "de clocher catalan". Et force est de constater que cette politique s'arrête au seuil de sa brasserie !
Une attitude dommageable, d'autant que l'on sait que la viticulture, même locale, souffre. Alors plutôt que d'aider la région de Saint-Trod'pez, qui en a donc à ne plus savoir qu'en faire, il serait bon d'inclure dans la mêlée sang et or nos vignerons locaux. Car eux aussi possèdent un réel savoir-faire (lisez les revues spécialisées, on parle même de notre rosé - domaine Vaquer, Trémoine de Rasiguères, etc. !) et contrairement à nos amis provençaux, ils ne bénéficient pas de toute la pub et la renommée qui depuis 100 ans ont fait le succès de la Côte-d'Azur et de ses produits.
Dans la tête du français moyen, comme après "vin de" il y a "Bordeaux", après "rosé", il y a "de Provence". Dans beaucoup d'endroits de France, dont notre région, des gens sont forcés de faire toujours mieux pour renverser ces présupposés, ces clichés, ces idées reçues qui ont la vie dure. Alors à l'heure où la viticulture des P-O n'a jamais été aussi qualitative, donner du sens à cette démarche me paraît la moindre des choses de la part d'un club prétendant défendre les valeurs locales...
D'autant que nos vins, qui commencent à se faire une place au soleil à l'étranger, souffrent toujours à domicile - nul n'est prophète en son pays - de cette vieille réputation attachant aux vins du Roussillon les mots "quantité", "fraude", "coupage avec les vins d'Algérie", "vins cuits". Les temps ont heureusement bien changé, grâce en premier lieu aux vignerons, mais aussi à des anonymes qui oeuvrent dans l'ombre depuis près de 30 ans, et dont M. Sanson (celui qui s'est insurgé dans les colonnes de l'Indép) fait partie.
Donc que la brasserie de l'Usap propose du rosé de Provence, très bien. Il en faut pour tous les goûts et le Catalan est déjà suffisamment taxé de sectarisme pour qu'on ne donne encore du grain à moudre à ses détracteurs. Mais que la brasserie d'un club catalan(iste ?) ne propose pour SEUL rosé qu'une vulgaire cuvée tropézienne quand nos vignerons, catalans, proposeront au moins aussi bon (et bien souvent moins cher, sans même parler des coûts de livraison), où est la logique ? Je rappelle que le quai Vauban est un des emblèmes de notre ville. Un de ces endroits où les touristes aiment à s'arrêter, prendre le temps au soleil, autour d'un petit verre. Leur proposer des produits locaux me paraît la moindre des choses si on veut les inciter à revenir, séduits qu'ils seront par cette typicité.
Si au lieu de voir "rosé de provence" et "porto" sur les cartes de nos cafés et restaurants, on pouvait lire "Côtes du Roussillon AOC rosé" et "Banyuls" ou "Maury", le département, dont l'Usap se targue d'être un des plus dignes représentants, ne s'en porterait que mieux. A cette figure de proue de la culture catalane, donc, de jouer le jeu en montrant l'exemple.
EDIT : pour info, le CIVR ne vend pas de vin. Il fait seulement la promotion des vins du Roussillon. Il n'a rien à gagner là-dedans, à l'inverse d'un sponsor... qu'il n'est pas !