"Top 14 - Wilfried Templier (journaliste à RMC) : ‘Tout le monde, y compris les diffuseurs, est content de revo"
"Wilfried Templier est l’une des voix de RMC Sport. Correspondant à Toulouse, et donc en charge de l’actualité du Stade Toulousain et du Castres Olympique, depuis 2006 ce natif de La Rochelle suit l’actualité du Top 14. L’Indépendant lui a tendu le micro pour livrer son sentiment sur cette compétition et le retour de l’USAP dans l’élite du rugby français. "
"Wilfried Templier, selon vous, quelle allure va avoir ce championnat de Top 14 version 2021-2022 ?
Il est hyper concurrentiel à tous les étages et homogène. Bien sûr il y aura des gros bras. Je pense à Toulouse, La Rochelle, au Racing 92, à l’UBB. Des outsiders entre guillemets comme Toulon, Clermont, le LOU, le Stade Français, Montpellier, Castres. Et puis un dernier tiers avec Brive, Pau, le BO et l’USAP. Mais malgré tout dans ces trois catégories, il y a des passerelles, des surprises. On le voit l’an dernier avec Montpellier qui joue longtemps le maintien, Brive qui aurait pu s’inviter à l’étage au-dessus. Cela peut être serré quand on voit que Bayonne et Pau ont bataillé un moment avec le même nombre de points et au final Bayonne joue les barrages avec la suite que l’on connaît (la descente en Pro D2, NDLR). Ou quand on voit la même chose avec La Rochelle et le Racing 92, et La Rochelle file en demi-finale. C’est un championnat super intéressant.
Comment se créent ses disparités entre les équipes qui jouent le haut du tableau et les autres ?
En raison du budget déjà, même s’il existe le salary cap (le plafonnement de la masse salariale des clubs, NDLR). Mais surtout en raison du travail depuis longtemps de certains clubs. À Toulouse par exemple, ça ne bouge pas trop, c’est culturel : il n’y a pas 15 mecs qui s’en vont et 15 autres qui arrivent. Parfois, il y a des fins de cycle. Mais Toulouse anticipe bien et régénère son équipe petit à petit. Elle fait partie des équipes dont le staff est en place depuis un moment. Après, c’est un cercle vertueux : il y a un collectif bien installé, une transmission, une culture de la gagne et les titres se remportent depuis 40 ans. La stabilité, c’est l’argument numéro un du succès de certaines équipes. Des clubs travaillent bien aussi le recrutement grâce à des directeurs sportifs efficaces. Je pense à Pierre Venayre à La Rochelle qui travaille en symbiose avec le président Vincent Merling. Et comme le disait Guy Novès, ‘c’est surtout quand vous avez les meilleurs joueurs que vous êtes le meilleur entraîneur.’
Le niveau général de cette compétition n’en reste pas moins élevé et reconnu à l’échelle mondiale ?
Cela fait un moment, mais on le voit d’autant plus avec deux équipes françaises finalistes en Coupe d’Europe l’an dernier (finale Toulouse-La Rochelle, 22-17). Il n’y a pas non plus des tonnes de championnats. C’est difficilement comparable avec le Super Rugby (compétition qui regroupe des franchises australiennes et néo-zélandaises, NDLR) où il n’y a pas de descente, où c’est plus fermé, où avec la Covid-19 les Néo-Zélandais sont restés entre eux. Ce n’est pas similaire au football où il y a plusieurs gros championnats en Europe. En Top 14, il y a du suspense jusqu’à la dernière minute de la dernière journée pour savoir qui va faire les phases finales, les barrages, qui va descendre. Cette formule est pas mal. Il y a parfois trop de matches, surtout pour les internationaux. Mais concernant ces derniers, une règle a apporté beaucoup à l’équipe de France, c’est celle des JIFF (Joueurs issus des filières de formation). Les joueurs qui sont alignés sur le terrain progressent, prennent confiance. Si le niveau du Top 14 est élevé, c’est aussi lié avec l’ascension de la génération des doubles champions du monde U20 (2018 et 2019) qui jouent dans ce championnat.
Comment voyez-vous le retour de l’USAP en Top 14 ?
Elle a déjà l’expérience de ce qu’il ne faut pas faire vu ce qu’elle a vécu en 2018-2019 (son accession et sa descente en Pro D2, NDLR). On imagine que l’USAP jouera le maintien. Oui, ça sera dur. Mais elle a l’avantage d’avoir survolé la Pro D2 la saison passée et d’avoir des bases de travail assez exceptionnelles. Le groupe n’a pas été trop modifié. À mon sens, l’USAP a tenté de se densifier en deuxième ligne avec Tevita Cavubati et Andreï Mahu. Il va falloir qu’elle fasse attention à gérer ses blessés car en Top 14 on arrive à un niveau physique incroyable. Il ne faudra pas qu’elle se mette tout de suite la pression même si les matches contre Brive, Biarritz et Pau jusqu’à début octobre sont importants et qu’ils pourraient donner le ton. Revoir l’USAP en Top 14 donne encore plus de crédit à la qualité de la Pro D2. En plus, c’est une équipe qui a joué la Coupe d’Europe, qui a été championne de France, qui a donné des internationaux à l’équipe de France. C’est une entité, une ferveur, une institution sur un territoire. Comme quoi, il s’en passe des choses en dix ans. Tout le monde, y compris les diffuseurs, est content de revoir l’USAP à cette place.
Les récentes performances de Melvyn Jaminet en équipe de France avec son parcours atypique sont-elles un éclairage de plus sur l’USAP cette année ?
Oui à partir du moment où ce n’est pas un joueur comme les autres. J’ai l’impression qu’il se passe quelque chose à chaque fois qu’il touche un ballon. Mais le plus dur arrive pour lui : confirmer. Il a montré que même sous la pression du maillot tricolore, il avait du sang-froid. Il va donner des maux de tête aux sélectionneurs. Donc forcément, ça va faire parler de l’USAP, et tant mieux. Il faut des joueurs qui sortent de l’ordinaire pour créer du spectacle. Il sort des standards, il est fantasque et bon buteur, ça sera précieux pour Perpignan. "