Top 14 : Joaquín Oviedo et Ignacio Ruiz, les "Pumitas" qui ont séduit l’USAP
Recueilli par Gilles Navarro
Joaquín Oviedo et Ignacio Ruiz ont grandi ensemble dans l’univers du rugby professionnel. Jusqu’à se retrouver cette saison sous le même maillot de l’USAP, où ils sont devenus des acteurs essentiels de la saison réussie de leur club. Ils racontent leur histoire rugbystique, des "Pumitas" au club doyen catalan.
Vous vous souvenez de votre première rencontre ?
Ignacio Ruiz : Oui, c’était avec les Pumitas(1). Nous avions été sélectionnés avec les moins de 20 ans pour préparer la Coupe du monde, qui a finalement été annulée à cause de la pandémie.
Joaquín Oviedo : Nous avons participé au camp d’entraînement, à Cordoba. Mais le Covid-19 a annulé la compétition, prévue en Italie.
Le CV de Joaquín Oviedo Infographie L'Indépendant
Vous aviez-joué l’un contre l’autre ?
J. O. : Oui nous avions disputé la finale argentine des U18, lui avec Buenos Aires et moi avec Cordoba. C’est Ignacio qui avait gagné(2)
I. R : En fait on a joué deux fois, la finale, plus un match amical…
Et vous vous êtes toujours bien entendus ?
J.O. : C’était difficile parce que moi je suis quelqu’un de timide, tandis qu’Ignacio est plus extraverti, plus sociable. Il rayonne davantage. Mais on a vite sympathisé.
I.R. : On partage la même vision du rugby. Nous avons les mêmes valeurs. On s’est tout de suite bien entendus.
Le CV d'Ignacio Ruiz. Infographie L'Indépendant
Comment avez-vous été amené à quitter l’Argentine ?
I.R. : Au cours de l’été 2022, mon agent m’a dit que mon profil intéressait les London Irish, en Angleterre. Je venais d’être sélectionné pour la première fois avec les Pumas, d’effectuer mes débuts internationaux lors du troisième test-match de la tournée des Ecossais en Argentine. Il y avait à Londres une colonie de joueurs argentins : Agustín Creevy, l’ancien capitaine des Pumas, Facundo Gigena, Juan Martín González, Lucio Cinti Luna. Je suis arrivé à Londres après les tests de l’été.
J.O. : En 2021, je venais de jouer Superliga americana avec les Jaguares, la franchise argentine, que nous avions gagnée. J’ai eu une proposition de l’USAP, qui remontait en Top 14. Tous les échos que j’ai pu avoir du club, de l’ambiance, de la ville, étaient bons. Alors j’ai signé. Et puis il y avait à Perpignan "Jéro"
(De La Fuente), "Pato"
(Fernandez), Bautista
(Delguy), Rimas
(Alvarez-Kairelis), et Carlos Vela (le médecin du club), un groupe argentin essentiel pour l’adaptation, l’installation.
Joaquín, c’est votre troisième saison sous le maillot de l’USAP, comment jugez-vous l’évolution de l’équipe, du groupe ?
La première saison, notre jeu était plus lent qu’aujourd’hui. L’équipe retrouvait le Top 14 et ne connaissait pas ses adversaires. Il a fallu s’adapter au rythme, au niveau de jeu. Aujourd’hui notre rugby est plus vif, plus rapide.
Ignacio, qu’est-ce qui vous a surpris, en arrivant à l’USAP ?
L’ambiance ! Aux Irish, il y avait aussi de l’ambiance, mais le stade n’était jamais plein. Ici, à Perpignan, la passion des supporters pour l’USAP, c’est de la folie. On dirait "la hincha" d’un club de foot argentin, les supporters fanatiques des grands clubs ! Sur le terrain, je n’ai pas ressenti tant de différence avec le rugby pratiqué en Angleterre. Mais pour mon premier match, contre Toulon, j’ai vu l’acharnement que mettaient les joueurs de l’USAP, à défendre leur ligne. Je me disais : "Mais ça ne va pas tenir…" Et nous avons tenu jusqu’à gagner le match. En Angleterre, il y a des équipes qui jouent avec un très haut niveau d’intensité, les Saracens, Northampton, Leicester, les Harlequins, Exeter… Ils demandent beaucoup d’engagement physique. Les rugbymen anglais mettent beaucoup d’intensité dans tous les secteurs du jeu, mêlées, mauls, rucks. Le jeu est plus structuré. L’occupation primordiale. Les Français aiment jouer plus librement… Dans le désordre. Et j’aime ça !
J.O. : C’est un rugby plus latin, qui se rapproche davantage de celui que nous jouons avec les Pumas. Le rugby français est plus déstructuré. A Perpignan, si tu mouilles le maillot, tu es de suite adopté. A Cordoba, quand je jouais pour mon club, je donnais tout sans jamais calculer.
Quel est votre regard sur les difficultés rencontrées en début de saison ?
J.O. : Les deux premiers matches, c’était une nouvelle équipe qui jouait sur le terrain. Tout était nouveau, l’entraîneur, les coéquipiers. On se connaissait peu entre nous. Nous étions une équipe désarmée. Franck manageait bien, mais il fallait nous laisser du temps.
I.R. : Dans ces moments-là, une seule solution : travailler. Il a fallu travailler dur pour construire l’équipe, peaufiner son jeu. Le problème, c’est que les supporters, eux, ils ne voient que le résultat. Et ce fut difficile. Parce que comment faire comprendre aux supporters que les choses allaient se mettre en place ?
Vous avez eu l’occasion de gôuter aux spécialités locales, comme la cargolade ?
J.O. : (il fait la moue) Les escargots, non ça ne me tente pas. J’ai goûté mais non… Je ne sais pas comment vous faites pour les manger… Je préfère le bras roulé avec de la crème… Comment vous l’appelez ? Bras de gitan, c’est çà !
I.R. : On est allé manger un jour tous ensemble dans un restaurant à Cane, où nous avons pu goûter les spécialités catalanes. Mais je ne me rappelle pas les noms des plats. Je goûte, j’aime… et c’est tout !
Comment vous voyez les trois derniers matches de la saison et comment vous aimriez qu’elle se termine ?
J.O. : J’aimerais qu’on se qualifie pour les play-offs… Ce serait la première fois que je participerais aux phases finales. Mais bon, avant de penser on va d’abord essayer de terminer cette saison de la meilleure des façons.
I.R : Je ne veux pas penser aux plays-offs, ni à l’access-match, ni à tout ça. Ce que je veux, c’est que l’USAP termine du mieux possible. J’ai trouvé à Perpignan un club, un groupe qui vit comme une famille. Ça m’a beaucoup aidé à m’intégrer, à me sentir comme chez moi. J’ai trouvé ici de la confiance. Pendant trois ans, je n’ai pas beaucoup joué. Je me suis beaucoup entraîné, que ce soit avec les Pumas ou les London Irish, mais mon temps de jeu était faible. Voir que l’on me fait confiance à Perpignan, et que je me sens à l’aise est formidable. J’aimerais que ça continue…
Cet été, l’Argentine accueille les Bleus pour deux matches, le 6 juillet à Mendoza, et le 13 juillet à Buenos-Aires. Vous y serez ?
J. O. : On espère bien. C’est toujours une fierté de porter le maillot de l’Argentine. Si on m’appelle, j’irais avec plaisir.
I.R. : Nous avons été convoqués, avec Jero
(De La Fuente) pour le stage organisé en Angleterre par le nouveau sélectionneur
(Felipe Contepomi) au mois de mars dernier (11-13) à Londres. On espère toujours faire partie du groupe, de la tournée, bien sûr…