Rugby à XV - Top 14 : Patrick Arlettaz, sept ans au service de l'USAP
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Patrick Arlettaz est à la tête de l'USAP depuis 2016. Mais il fréquente Aimé-Giral depuis l'enfance. L'Indépendant - Olivier GOT
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Publié le 01/06/2023 à 17:15 , mis à jour à 17:24
Guilhem Richaud
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Le manager de l'USAP va quitter ses fonctions après l'access-match samedi 3 juin, contre Grenoble. Pendant sept ans, il a su poser les fondations de la reconstruction du club.
Samedi, pendant la longue journée que va vivre l'USAP avant le coup d'envoi de la rencontre contre Grenoble, pour l'access-match, Patrick Arlettaz essaiera sans doute de ne rien laisser paraître à ses joueurs. Quelques heures avant la rencontre, il tiendra l'un des discours dont il a le secret. Il parlera de plaisir, de courage, de responsabilité. Du club aussi, pour lequel tous se battent. Et puis des joueurs eux-mêmes, évidemment, qui vont, se battre pour ce qu'ils méritent, le maintien en Top 14.
Pour évacuer la pression de cette journée, le manager catalan, 51 ans, fumera sans doute pas mal de clopes. Mais en cette journée particulière, pour le club comme pour lui-même, comment lui reprocher ? Le manager catalan sait qu'au coup de sifflet final, son aventure à la tête de Perpignan prendra fin. Et pour un gamin de La Salanque comme lui, sang et or depuis toujours, qui a l'USAP dans les veines, cela représente quelque chose.
Une vision moderne du rugby
Arlettaz a tout connu sous les couleurs sang et or. Des travées d'Aimé-Giral, quand il était gamin, où son grand-père lui a refilé le virus, au titre du Du-Manoir 1994, en passant par toutes les catégories de jeunes, puis, plus tard, un retour comme entraîneur adjoint, d'abord, et, depuis 2016, en première ligne : entraîneur en chef, puis manager.
Le Arlettaz coach aura été à l'image du Arlettaz joueur : brillant, capable de coup de génie, fort en gueule et surtout, passionné par le jeu et amoureux de ses joueurs. Avec une certaine idée du rugby qui colle bien à l'USAP d'aujourd'hui : un peu fou, avec l'envie de jouer et l'idée du mouvement permanent. Le tout dans le combat, toujours, puisque c'est et ça restera l'ADN de ce club.
L'homme de la reconstruction
L'histoire d'Arlettaz est connue : parti, en 1996 pour Narbonne, puis, cinq ans plus tard pour Montpellier. C'est là-bas qu'il est devenu coach, avant de faire le chemin inverse Narbonne (après un passage à l'ES Catalane), puis l'USAP donc. En deux fois. La première, comme pour beaucoup, a été un traumatisme. Recruté par Marc Delpoux, comme entraîneur des arrières, il était dans le staff lors de la descente de 2014. Mais a arrêté l'aventure la tête haute. Encore sous contrat, mais pas convaincu par Alain Hyardet, choisi par François Rivière pour succéder à Marc Delpoux, il décidera de partir de lui-même. Sans passer par la case conflit, prud'hommes ou indemnités. Une rareté dans un milieu dans lequel il détonne.
La carrière de Patrick Arlettaz en bref. Infographie L'Indépendant
Deux ans plus tard, en septembre 2016, après un début de saison compliqué (quatre défaites en cinq journées), Christian Lanta, manager, le rappelle pour remplacer François Gelez et de Philippe Benetton. Il est accompagné de Perry Freshwater, encore à ses côtés sept ans plus tard. Les deux hommes redressent le club : l'USAP termine 6e de Pro D2. Pas de qualification pour les phases finales, mais des bases posées pour l'année suivante. En 2017-2018, Perpignan termine premier de la saison régulière et roule sur les phases finales. Championne (face à Grenoble), l'USAP d'Arlettaz retrouve le Top 14 quatre ans après l'avoir quitté. L'expérience tourne court. Pas prêt, trop petit au milieu des gros, le club ne gagne que deux matches et redescend. Patrick Arlettaz survit à cet épisode. Parce qu'aucun autre n'aurait fait mieux dans ces conditions. Mais surtout parce que Lanta et Rivière en sont persuadés, il est la bonne personne pour construire sur le long terme.
Remarquable meneur d'hommes
Ce sera le cas. Perpignan aurait dû remonter en Top 14 l'année suivante. Mais le Covid est passé par là, repoussant l'échéance d'une année avec un nouveau titre acquis en 2021 aux dépens de Biarritz. Ce retour dans l'élite sera beaucoup plus probant qu'en 2018. Tout au long de la saison 2021-2022, l'USAP d'Arlettaz détonne. Et tous les gros ou presque tombent à Aimé-Giral. Suffisant pour accrocher l'access-match et un succès acquis contre Mont-de-Marsan pour prolonger l'aventure. Un an plus tard, Perpignan en est au même point. Un nouveau rendez-vous à quitte ou double, cette fois contre Grenoble. Et encore une fois, une bonne partie de la saison, le club a étonné par sa capacité à jouer et à marquer des essais tous plus beaux les uns que les autres.
Mais sept ans à la tête d'un club comme l'USAP, ça use. D'autant plus après une première partie de saison compliquée, où la chance n'a que trop rarement tourné dans le bon sens. En janvier, après une défaite contre Clermont qui mettait Perpignan à sept points de Brive, alors 13e, les dirigeants ont pensé un temps réorganiser le fonctionnement du staff, lui demandant de redescendre davantage sur le terrain, au détriment de David Marty. Une hypothèse qui n'allait pas à Arlettaz, chef d'équipe solidaire. Il a alors proposé son départ sans rien demander en retour. Avec classe, encore et toujours.
Il a reçu le meilleur des soutiens : celui de ses joueurs. Tous ont choisi, par la voix de Mathieu Acebes, son capitaine le plus fidèle, et des autres cadres du groupe, de demander à François Rivière de leur faire confiance et de continuer ainsi. Ils avaient raison. L'USAP a retrouvé son jeu et a réussi à s'en sortir. Soudée autour d'un manager qui, en février a annoncé son départ. Usé, fatigué, lassé sans doute un peu aussi, mais surtout effrayé que son discours cesse de passer. Depuis cette annonce, l'objectif de tout le groupe est clair : il faut se sauver. Pour le club, pour les joueurs eux-mêmes, mais aussi pour Patrick Arlettaz.
Dans le gotha des coaches catalans
Dans quelque temps, il faudra se poser la question de la place de Patrick Arlettaz dans l'histoire de l'USAP. Pendant sept ans, il a fait des miracles dans un Top 14 moderne où un club avec si peu de moyens n'est malheureusement pas forcément à sa place. En attendant, même si le maintien n'apporte pas une ligne à un palmarès, il reste à Arlettaz une dernière mission à réussir.
Ensuite, il passera la main à un ami Franck Azéma. Au moment de l'annonce du retour de l'ancien adjoint de Jacques Brunel, en avril, le manager catalan a été le premier à se réjouir. Il savait que c'était une bonne nouvelle pour son club, qui va pouvoir poursuivre sa croissance. Le tout sur des fondations solides dont Patrick Arlettaz aura été le principal maître d'ouvrage.
De son côté, après un peu de repos, bien mérité, il pourrait vivre une nouvelle expérience. Il fait partie des personnes approchées par Fabien Galthié pour remplacer Laurent Labit en équipe de France. Les deux hommes s'apprécient et partagent une vision commune du jeu. Une consécration pour un gamin catalan faiseur de miracle depuis sept ans...