Alors que les sang et or se déplacent à Domec vendredi (20 h 45), Lucas Dubois, la révélation catalane du début de saison, se confie.
On a toujours en stock de bons vieux clichés, arrachés à l’expérience, quand il s’agit de commenter l’actualité sportive. Celui du petit jeune qui déboule dans le paysage, insouciant et sans complexe, aurait pu coller à Lucas Dubois (21 ans, 1,82 m, 88 kg). Inconnu du grand public il y a deux mois, l’ailier ou arrière sang et or vient d’enchaîner deux titularisations en trois matches, pour un essai inscrit et une finesse qui saute déjà aux yeux. Mais quand on gratte un peu le vernis, c’est un profil plus complexe qui se dessine. Celui d’un jeune joueur à la maturité étonnante, façonnée par un parcours jalonné d’écueils.
Le neveu de Pascal Bomati s’est relevé de deux ruptures des ligaments croisés, le genou gauche en 2016, puis le droit l’année suivante. Le sort s’est acharné puisqu’une blessure au ménisque l’a écarté des terrains plusieurs mois la saison dernière. Avec le concours d’une préparatrice mentale basée à Toulouse, l’étudiant en troisième année d’IAE (Institut d’administration des entreprises) à la fac de Perpignan s’est accroché à son rêve de jouer en pro sous les couleurs de son club formateur. Un entêtement récompensé.
Lucas, prévu avec les Espoirs, vous êtes entré dans le groupe pro cet été suite à la blessure de Wandile Mjekevu (rupture du tendon d’Achille) et depuis, tout va très vite pour vous…
J’ai commencé à m’entraîner avec les pros début août et ça s’est bien passé. Quand je suis arrivé, je pensais juste m’entraîner, sans participer aux matches amicaux. J’ai eu la chance de les faire et derrière, ça s’est enchaîné. Commencer titulaire face à Béziers (victoire 23-13 lors de la première journée), c’était inespéré. Si on m’avait dit ça un mois plus tôt, je n’y aurais pas cru. Je pense que c’est un peu le travail que j’ai fait sur ces années de blessures qui paie maintenant.
Tout peut s’arrêter du jour au lendemain
À force d’enchaîner les blessures, avez-vous songé à arrêter le rugby ?
Depuis tout petit, je rêve de devenir rugbyman professionnel. Je me suis posé des questions, je me suis demandé si j’allais y arriver, mais j’ai tout fait pour parvenir à ce qui se passe maintenant. Je me suis dit que j’étais maudit, mais j’ai toujours eu cet espoir de revenir. J’avais pris un préparateur physique, Jérôme Carrasus, à mes côtés. Même si à la fin, je n’y arrivais pas, je voulais tout donner pour ne pas avoir de regrets. C’était dur, mais je pense que ça m’a forgé un mental et que ça m’a fait grandir. Après être passé par des moments comme ça, je savoure aujourd’hui, tout en sachant que tout peut s’arrêter du jour au lendemain. Alors je profite.
Avez-vous le sentiment de rattraper le temps perdu ?
C’est exactement ça. Pendant ces années de blessures, je me disais que si je n’avais pas eu ces problèmes-là, j’aurais avancé plus vite. Maintenant, je vois que tout se goupille assez bien. Donc c’est vraiment cette sensation de récupérer ces années perdues et le plaisir de jouer pour le club de la ville où je suis né. En plus, mon oncle a joué ici donc c’est un rêve de pouvoir évoluer sous ces couleurs.
Solide à l’aile face à Béziers, vous avez été contraint de passer arrière en cours de match contre Colomiers (34-13), après la blessure de Jonathan Bousquet (3e), sans que votre rendement s’en ressente*. Vous semblez imperturbable…
Disons que j’essaie de faire abstraction de tout ça. Jouer ailier ou arrière, c’est pareil, j’ai toujours alterné. Je me concentre sur ma performance, sur l’équipe. J’ai encore du mal à réaliser que je joue avec les pros à Aimé-Giral, j’essaie de me concentrer sur les consignes des entraîneurs pour être performant.
propos recueillis par Laurent Morales