Blessés ou simplement pas retenus dans le groupe, de nombreux Usapistes, et pas des moindres, n’étaient pas sur le terrain lors de la finale victorieuse de 2009.
Dan Carter
Il devait être LA star omniprésente et entraînante, pygmalion d’un titre de champion de France rêvé depuis plus d’un demi-siècle. Telle fut la destinée de l’USAP, mais sans le magicien des All Blacks (111 sélections), victime d’une rupture du tendon d’Achille le 31 janvier 2009 sur un placage de Hernandez à la dernière minute du match Stade Français-USAP (13-13).
Cinq matches (4 en championnat, 1 en H-Cup) et puis bye-bye, lors d’une soirée maudite qui vit les sang et or passer la pire troisième mi-temps de l’année dans une boîte sur les Champs-Élysées. Les actionnaires catalans n’avaient cependant pas cassé leur tirelire pour rien (700 000 euros pour sept mois). Car, même absent, Dan Carter, par sa classe, son accessibilité et son aura, infusa un esprit qui escorta l’USAP jusqu’au Stade de France.
Ainsi vaquait le temps de l’insouciance pour celui qui n’était pas encore double Champion du monde. Ami intime de Damien Chouly qui lui fit découvrir David Guetta ("j’adowe !"), fan de Barcelone où il profita des joies de l’anonymat, tête de proue d’un marketing qui sentait bon l’amateurisme en ce temps-là, "DC" ressemblait de loin au joyau surprotégé qui fit plus tard les beaux jours du Racing 92.
L’histoire retiendra qu’il souleva son premier Bouclier de Brennus au Castillet et qu’il se prit de passion pour l’extravagance catalane. Le meilleur pour la fin ? Une cuite monumentale de 72 heures, bière(s) en main et gilet jaune sur le dos, pour fêter le titre. Sans béquilles. Sacré garnement !
Chris Cusiter
Courtois, élégant, supérieurement intelligent, Chris Cusiter était tout cela à la fois. Débarqué à l’USAP avec un pedigree d’international écossais (68 sélections) et Lion Britannique (6 sélections), le demi de mêlée a activement contribué à nourrir le mantra du manager Jacques Brunel : maîtriser la passion. Science du jeu et expérience ne suffirent pas cependant à en faire un titulaire incontournable. Victime d’un Nicolas Durand impérial et de l’état de grâce de David Mélé, Chris Cusiter prit place en tribune lors de la finale. Fidèle à lui-même, avec classe et dignité.
Ovidiu Tonita
Sans le retour de blessure de Gregory le Corvec dans la dernière ligne droite et l’éclosion inexorable du jeune chien fou Jean-Pierre Pérez, Ovidiu Tonita aurait fait le nombre sur la feuille de match. Usapiste depuis 2004, le flanker roumain (47 sélections), homme de devoir et d’abnégation qui lui vaudra le surnom de "TNT", se rattrapera un an plus tard en étant titularisé lors de la finale perdue face à un Clermont revanchard.
Henry Tuilagi
Une masse, un colosse, un "surhomme". Doté d’un physique à faire trembler l’adversaire, le troisième ligne samoan (6 sélections) était interdit de muscu afin de préserver son rapport puissance-vitesse. Aux entraînements, on connaît plus d’un joueur qui a fait mine de relacer ses crampons pour ne pas le défier. Utilisé quasi systématiquement en premier temps de jeu pour user et faire mal au rideau adverse, Henry Tuilagi fut l’un des chouchous d’Aimé-Giral, rompus aux onomatopées à chacune de ses percussions ("Ouuuuuh !"). La technicité d’un Damien Chouly, précieux dans la liaison avants-trois-quarts, le privera néanmoins de dessert à Saint-Denis. Mais lui aussi aura une deuxième chance l’année suivante. Pas pour le même résultat…
Nathan Hines
Plaquer, jumper, passe sautée, parler français, Nathan Hines était - question jeu - le seul "gros" badé par les trois-quarts. Plutôt rare pour un deuxième ligne écossais. Mais Nathan, adorable nounours au civil, était l’un des plus grands (75 sélections). Si grand qu’il fut sélectionné en 2009 pour la Tournée des Lions en Afrique du Sud au détriment de l’aventure sang et or. Un choix Cornélien ? Non, juste un crève-cœur pour Hines, qui touchait là au Graal de tout joueur anglo-saxon : être un Lion. À tout renoncement revers de fortune. Et c’est le jeune Guillaume Vilacéca de Céret, tout heureux de sauter sur l’occasion, qui mangea finalement le gâteau dans le groupe des vingt-trois.
Samueli Naulu
Il faisait toujours marrer son parrain protecteur David Marty, et vice-versa. Puis sa fantaisie gagna tout le vestiaire. Et enfin, sa joie communicative irradia d’une belle insouciance les festivités du sacre. Samueli Naulu, premier fidjien de l’USAP contemporaine, resta cinq années à Perpignan (2005-2010) et fit entrevoir de belles promesses ses deux premières saisons. La suite est beaucoup plus triste. Gravement blessé au genou, il ne disputa pas la moindre minute de jeu en 2008-09, ce qui le prive officiellement du titre. Le 30 mars 2013, il disparaît tragiquement dans un accident de voiture à Issigeac. Champion forever, pour tous ceux qui l’ont connu.
Christophe Manas
En costard-cravate lors de la finale 2009, titulaire en 2010 comme Ovidiu Tonita et Henry Tuilagi, l’ailier Christophe Manas est un vieux de la vieille, désigné trois fois capitaine cette saison. Sacré Champion de France 1998 avec le Stade Français, "Tanas" a sans doute dû l’avoir mauvaise de ne pas être sur le pré, mais sa conscience usapiste, jamais démentie en neuf ans de présence au club (1996-97 et 2002-2010), lui fit pleinement savourer la folie de cet été incandescent.
Et les autres…
Des quarante-quatre joueurs associés dans la quête du titre, qui se souvient que Rémy Alligier a disputé quatre minutes de jeu, quatre minutes valant éternité ? Cette année-là vit également le demi de mêlée Florian Cazenave et le pilier gauche Jérôme Schuster (cousin de Nicolas Mas) taper à la porte. Charles Géli, qui revient cette saison au bercail pour l’ultime défi de sa carrière, disputait quant à lui 16 matches. Le flanker Bertrand Guiry, lui, n’était pas encore un futur capitaine de l’USAP (6 matches), tandis que l’ailier Adrien Planté eut la malchance de se briser le tibia-péroné au printemps (contre Clermont…). Même infortune pour Nicolas Laharrague, victime de la "malédiction du dix". Quant à l’ouvreur argentin Ignacio Mieres, recruté au pied levé pour remplacer Dan Carter, la pression était trop forte pour s’imposer dans le money-time. On ne voudrait oublier personne, mais impossible de citer tous les acteurs. Ils étaient quarante-quatre et, dix ans plus tard, tous peuvent s’enorgueillir d’avoir touché le bout de bois.
(*) Les Sud-Africains Gerrie Britz et Philip Burger (injoignables), les entraîneurs de Clermont Bernard Goutta et Franck Azéma (retenus pour les phases finales) et le président Paul Goze (deuil familial) ne figurent pas - pour l’instant - dans la série "L’Odyssée de l’USAP". À suivre…
Il y a dix ans, l’USAP battait Clermont en finale de championnat de France (22-13) et ramenait en Catalogne son septième bouclier de Brennus. Les 22 joueurs sur la feuille de match, ce 6 juin 2009, ont fait le job. Mais la saison avait été longue et beaucoup d’Usapistes, privés de finale, ont mis leur pierre à l’édifice.
Outre la plus grande star de l’histoire de l’USAP, Dan Carter, beaucoup d’autres auraient mérité de fouler la pelouse du Stade de France. Parmi eux, Cusiter, Tonita, Tuilagi, Hines, Manas et d’autres encore...
Demain : Jacques Brunel
Samedi :
Guilhem Guirado
Dimanche :
Nicolas Mas