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Face aux inquiétudes grandissantes sur la situation économique du rugby hexagonal, Patrick Arlettaz, entraîneur de l'USAP qui reçoit Béziers samedi (21h), livre ses impressions.
Les incertitudes sur la solidité de l'économie du rugby sont-elles une source d'inquiétude ?
Ça l'est toujours quand tout un système dont on fait partie, qui nourrit nos familles, est en danger. C'est en toile de fond et c'est une anxiété qui existe, pas que pour le rugby mais pour le sport pro en général. Mais d'une part, il y a le côté invraisemblable de la chose pour les gens du milieu, on n'arrive pas à le croire. Tout comme personne n'imaginait une pandémie mondiale et tout ce qui nous arrive, je ne suis pas persuadé que l'imagination humaine soit capable d'entrevoir une ampleur pareille. D'autre part, très vite il y a l'instinct de survie qui rejaillit.
Comment le définiriez-vous ?
S'intéresser principalement à ce qu'on maîtrise. Nous, c'est notre capacité à nous entraîner, nous adapter aux entraînements, à être compétitifs, jouer des matches et les gagner, tout ça quoi. Ça nous occupe. On nous dit qu'il y a une énorme différence entre la jauge à 1000 et la jauge à 0 (parce qu'elle permettrait de maintenir les prestations pour les partenaires), donc on veut croire que même dans une pandémie comme ça, très vite on peut la retrouver. Et puis les Américains disent qu'ils ont sorti un vaccin non ? Donc voilà, tu te raccroches à ce que tu peux.
Contrairement au premier confinement, l'USAP peut continuer...
(il coupe) Le fait d'aller au boulot, de travailler, on a l'impression, pas que la vie continue, mais que tout ne va pas s'arrêter demain. Il y a peut-être du déni là-dedans, sans doute même, mais c'est une façon de se protéger.
"La flambée des salaires a tendance à se freiner"
Vous avez connu le rugby avant le professionnalisme. Quel regard jetez-vous sur son évolution ?
La première partie de l'évolution a été une grosse réflexion sur les contenus d'entraînement. Quand on est passé pros, on était quasiment dans l'obligation de passer de deux à sept séances hebdomadaires. Puis, il y a eu une deuxième salve : les contenus changent, les infrastructures doivent changer. Il y a eu les premiers espaces de musculation, cardio, le matériel en lui-même s'est développé. Ensuite, la troisième vague a été l'augmentation des salaires. Ça a duré très longtemps mais je crois que maintenant, il y a une réflexion sur le fait qu'on ne pourra pas suivre cette courbe ad vitam aeternam. Que faire ? Il faut de nouveau mieux les entraîner. Depuis quelques années, dix ans pour certains, on voit des centres d'entraînement qui naissent de partout, des nouvelles recherches sur la façon d'entraîner, etc. Ceux qui sont le plus prêt maintenant sont ceux qui l'ont le plus anticipé.
Le rugby semble fragile aujourd'hui. S'est-il trompé de chemin ?
Je ne suis pas persuadé qu'on avait beaucoup de choix. À un moment donné, la visibilité médiatique, la multiplicité des partenaires et le merchandising étaient trop limités pour suivre la montée des salaires et survivre à ce que coûte le rugby. Les stades eux-mêmes sont passés d'amateurs à pro du jour au lendemain, ils n'étaient pas prêts pour tout ce qui est loges, réceptif... Bref, générer des ressources indépendantes. Or, le coût de ce sport a doublé, triplé, quadruplé même de manière très rapide, ce qui a conduit à une transformation vers le modèle qui est encore le nôtre, appuyé sur des présidents-mécènes.
Faut-il plus encore réguler l'économie du rugby ?
La régulation se fait déjà, la flambée des salaires a tendance à se freiner. Si le foot a vu ses salaires exploser, c'est dû évidemment à la manne de l'audiovisuel, du merchandising, mais beaucoup aussi sur l'achat et la vente de joueurs, ce qui n'existe pas en rugby ou est marginal. Un mec que tu signes six ans comme au foot parce que tu sais que tu vas le vendre deux ans plus tard, ça n'existe pas. Aucun président n'achète un joueur pour faire monter sa cote, il veut qu'il soit rentable dès le lendemain. Je ne dis pas que je suis pour ce système mais je pense que c'est celui-là, cette économie de transaction, qui a amené les footeux vers une autre dimension en créant une spéculation. Mais est-ce qu'il faut vraiment ça pour le rugby ? Une autorégulation des salaires, une multiplication des ressources de club, je suis quand même plus là-dessus.
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Les incertitudes sur la solidité de l'économie du rugby sont-elles une source d'inquiétude ?
Ça l'est toujours quand tout un système dont on fait partie, qui nourrit nos familles, est en danger. C'est en toile de fond et c'est une anxiété qui existe, pas que pour le rugby mais pour le sport pro en général. Mais d'une part, il y a le côté invraisemblable de la chose pour les gens du milieu, on n'arrive pas à le croire. Tout comme personne n'imaginait une pandémie mondiale et tout ce qui nous arrive, je ne suis pas persuadé que l'imagination humaine soit capable d'entrevoir une ampleur pareille. D'autre part, très vite il y a l'instinct de survie qui rejaillit.
Comment le définiriez-vous ?
S'intéresser principalement à ce qu'on maîtrise. Nous, c'est notre capacité à nous entraîner, nous adapter aux entraînements, à être compétitifs, jouer des matches et les gagner, tout ça quoi. Ça nous occupe. On nous dit qu'il y a une énorme différence entre la jauge à 1000 et la jauge à 0 (parce qu'elle permettrait de maintenir les prestations pour les partenaires), donc on veut croire que même dans une pandémie comme ça, très vite on peut la retrouver. Et puis les Américains disent qu'ils ont sorti un vaccin non ? Donc voilà, tu te raccroches à ce que tu peux.
Contrairement au premier confinement, l'USAP peut continuer...
(il coupe) Le fait d'aller au boulot, de travailler, on a l'impression, pas que la vie continue, mais que tout ne va pas s'arrêter demain. Il y a peut-être du déni là-dedans, sans doute même, mais c'est une façon de se protéger.
"La flambée des salaires a tendance à se freiner"
Vous avez connu le rugby avant le professionnalisme. Quel regard jetez-vous sur son évolution ?
La première partie de l'évolution a été une grosse réflexion sur les contenus d'entraînement. Quand on est passé pros, on était quasiment dans l'obligation de passer de deux à sept séances hebdomadaires. Puis, il y a eu une deuxième salve : les contenus changent, les infrastructures doivent changer. Il y a eu les premiers espaces de musculation, cardio, le matériel en lui-même s'est développé. Ensuite, la troisième vague a été l'augmentation des salaires. Ça a duré très longtemps mais je crois que maintenant, il y a une réflexion sur le fait qu'on ne pourra pas suivre cette courbe ad vitam aeternam. Que faire ? Il faut de nouveau mieux les entraîner. Depuis quelques années, dix ans pour certains, on voit des centres d'entraînement qui naissent de partout, des nouvelles recherches sur la façon d'entraîner, etc. Ceux qui sont le plus prêt maintenant sont ceux qui l'ont le plus anticipé.
Le rugby semble fragile aujourd'hui. S'est-il trompé de chemin ?
Je ne suis pas persuadé qu'on avait beaucoup de choix. À un moment donné, la visibilité médiatique, la multiplicité des partenaires et le merchandising étaient trop limités pour suivre la montée des salaires et survivre à ce que coûte le rugby. Les stades eux-mêmes sont passés d'amateurs à pro du jour au lendemain, ils n'étaient pas prêts pour tout ce qui est loges, réceptif... Bref, générer des ressources indépendantes. Or, le coût de ce sport a doublé, triplé, quadruplé même de manière très rapide, ce qui a conduit à une transformation vers le modèle qui est encore le nôtre, appuyé sur des présidents-mécènes.
Faut-il plus encore réguler l'économie du rugby ?
La régulation se fait déjà, la flambée des salaires a tendance à se freiner. Si le foot a vu ses salaires exploser, c'est dû évidemment à la manne de l'audiovisuel, du merchandising, mais beaucoup aussi sur l'achat et la vente de joueurs, ce qui n'existe pas en rugby ou est marginal. Un mec que tu signes six ans comme au foot parce que tu sais que tu vas le vendre deux ans plus tard, ça n'existe pas. Aucun président n'achète un joueur pour faire monter sa cote, il veut qu'il soit rentable dès le lendemain. Je ne dis pas que je suis pour ce système mais je pense que c'est celui-là, cette économie de transaction, qui a amené les footeux vers une autre dimension en créant une spéculation. Mais est-ce qu'il faut vraiment ça pour le rugby ? Une autorégulation des salaires, une multiplication des ressources de club, je suis quand même plus là-dessus.
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