Top 14 - "On n’est pas des robots, on fait un sport qui est très dur physiquement" : Tommaso Allan, l’ouvreur de l’USAP, revient sur ses derniers mois compliqués
Hugo Bové20/12/2024 à 11:58
Tommaso Allan veut retrouver ses capacités physiques pour aider l’USAP à remonter au classement.L'INDEPENDANT - MICHEL CLEMENTZ
L’année 2024 de Tommaso Allan n’a pas été de tout repos. Entre carrière internationale entre parenthèses, plusieurs blessures et son potentiel physique pas à son maximum, l’international italien (81 sélections) veut désormais retrouver du plaisir sur le terrain. Avant le déplacement au Stade Français (ce samedi 16 h 30), l’ouvreur a accordé quelques minutes à L’Indépendant pour revenir sur son année et sur la période compliquée qu’il a vécue.
Après un mois à l’infirmerie, comment vous sentez-vous ?
Ça va bien. Je me suis fait mal au mollet pendant la tournée d’automne avec l’Italie. C’est dommage, parce que j’avais beaucoup envie de jouer ces matches-là, puis de rentrer ici pour aider l’équipe le plus possible. Maintenant, j’ai fait quatre semaines de réathlétisation et, en ce moment, je me sens très bien. Je me sens vraiment en forme, je n’ai plus mal au mollet, ni à aucun endroit. J’espère que ça va se voir sur le terrain, parce que j’ai envie de mettre un peu de gaz et utiliser toutes mes capacités sans avoir mal.
En 2024, vous avez eu pas mal de pépins physiques (ischio, mollet, genou…). Comment l’expliquez-vous ?
Je ne sais pas. Honnêtement, j’ai joué deux ans sans avoir eu de blessures, et je me suis pété l’ischio contre Oyonnax
(le 23 mars, NDLR). Ensuite, j’ai eu 2-3 petites blessures, mais rien de grave. C’est plus une fatigue physique peut-être, je ne sais pas. Après, ce sont des petites blessures, ce n’est pas grand-chose. Je préfère avoir ça qu’être arrêté pour 8 mois. Désormais, je me sens très bien, j’ai fait toutes les réathlétisations que je devais faire et mon corps se sent bien. Ces 4 semaines d’absence m’ont donné un peu de temps pour récupérer aussi. Maintenant, je veux enchaîner le plus de matches possibles, car c’est une période très importante pour le club, et je veux être ici pour donner le meilleur pour l’équipe quand je suis à disposition.
En février dernier, vous aviez annoncé mettre entre parenthèses la sélection italienne. Était-ce vraiment un besoin vital à ce moment-là ?
Oui, c’était une période dure. J’en ai beaucoup parlé quand ça s’est passé. J’ai enchaîné deux années dures, mentalement et physiquement, avec le Tournoi des 6 Nations, la Coupe du monde, quand j’étais encore aux Harlequins… Puis il y a eu mon déménagement ici, j’avais beaucoup de choses à faire, beaucoup de matches de rugby à jouer, beaucoup de temps passés loin de la famille. Et, aussi, au moment où j’ai annoncé cette décision, il y avait encore beaucoup de pression sur le club pour le maintien en Top 14. Alors je pense que c’était une bonne décision pour moi, pour me régénérer mentalement, passer plus de temps avec ma famille, rester encore plus proche du club ici et essayer de l’aider le plus possible à rester en Top 14.
Et maintenant ?
J’ai fait cette coupure, ça m’a fait du bien. Maintenant, j’ai envie de retrouver la sélection, car je pense que ce n’est pas encore fini avec eux. Mais, honnêtement, quand j’ai annoncé ça, je ne savais pas si j’allais continuer ou pas. À ce moment-là, c’était un besoin d’arrêter, et de voir après. Aujourd’hui, j’ai été content de les retrouver, car ça me donne beaucoup de confiance et je reste un compétiteur. Je veux jouer les matches les plus costauds, car c’est bon pour moi, pour le club, et pour l’Italie. J’espère que ça va continuer.
Quel rôle a eu Gonzalo Quesada (1) avec vous ?
Je pense que Gonzalo est un très bon entraîneur et, humainement, c’est un très bon mec. Quand j’ai parlé avec lui en février, il a compris que je n’étais pas bien. On a beaucoup discuté quand j’ai arrêté. Je lui ai dit que je ne voulais pas être là, que ce n’était pas bien pour moi, que ce n’était pas bien pour l’équipe. Il a compris. Il y a beaucoup d’entraîneurs, je pense que si tu fais quelque chose comme ça, pour eux, c’est fini. Lui, il voulait juste que je me sente bien mentalement. Il a toujours été de mon côté, il m’a beaucoup aidé. Et quand on a parlé avant la tournée de novembre, il a été très content de me voir. Il n’y en a pas beaucoup, je pense, des gens comme ça.
Je peux donner le maximum de mes capacités quand je joue à l’ouverture.
Dans une interview à L’Équipe il y a quelques jours, votre compatriote Ange Capuozzo a exprimé le mal-être qu’il a vécu ces derniers mois, en expliquant que les joueurs ne sont pas des "surhommes". Quel est votre regard sur ça ?
On n’est pas des robots. On fait un sport qui est très dur physiquement. Tu prends des grosses blessures, tu enchaînes beaucoup de matches. En Top 14, encore plus, on fait beaucoup de matches. Après, tu enchaînes la Challenge Cup ou la Champions Cup, il faut voyager en Afrique du Sud
(en décembre 2022, il avait affronté les Sharks à Durban avec les Harlequins). Ce n’est pas facile. Tu peux enchaîner 30 matches dans une saison, c’est dur ! Puis tu as les matches internationaux… On n’est pas des robots du tout. Il faut être conscient qu’on est des sportifs, mais c’est un sport très physique. Il faut bien faire ses soins et essayer de récupérer le plus possible à tous les niveaux. J’espère qu’il y aura des réflexions à ce sujet dans le futur.
Comment jugez-vous le début de saison de l’USAP ?
C’est compliqué. Mais on a déjà vécu ces choses la saison dernière et les saisons avant aussi. Puis, là, on a beaucoup de blessures. Mais je trouve que, dans le groupe, on est toujours restés proches. C’est notre force. Ça ne va pas être facile, on le sait. Tous les matches en Top 14 sont durs, encore plus quand tu vas à l’extérieur. Les deux défaites qu’on a eues à domicile
(7-26 contre Montpellier et 13-22 face à Toulon, NDLR) ne sont pas bien pour nous, mais j’ai beaucoup de confiance en ce groupe. On aura beaucoup de joueurs qui vont rentrer dans les prochaines semaines. On est toujours en confiance, on n’a pas perdu la tête, on est bien mentalement. On sait ce qu’on doit faire pour rester dans ce Top 14, on l’a déjà fait les dernières années. Je suis confiant qu’on va le faire aussi cette année. On va voir comment vont se passer ces mois de décembre et janvier. Après, on pourra penser à autre chose.
Avec la blessure de Jake McIntyre, le staff a décidé de vous donner le numéro 10, faisant glisser Antoine Aucagne ou Louis Dupichot à l’arrière. Cela vous donne plus de responsabilités. C’est ce que vous recherchez ?
Moi, je me sens très bien en 10. J’ai toujours dit que je suis venu ici en tant que 10. Quand l’équipe a besoin de moi à l’arrière, je joue à l’arrière, ce n’est pas un problème. Mais je pense que je peux donner le maximum de mes capacités quand je joue à l’ouverture. C’est aux entraîneurs de décider. En ce moment, ils ont décidé ça. Je vais leur montrer qu’ils ne font pas le mauvais choix. Car je me sens très bien, et je sens que j’ai beaucoup plus de responsabilités. Je veux aider l’équipe le plus possible, en espérant qu’il n’y aura plus de petites blessures.
(1) Le sélectionneur de l’Italie.