« Si on remporte tous nos derniers matches....» À force de repousser à demain son sursaut à l’extérieur, les Catalans perdent un temps précieux dans l’optique de la qualification. Le compte à rebours a commencé.
Ça ira mieux demain, comme ils disent. Mais demain ne sera-t-il pas trop tard pour l’USAP, comme beaucoup commencent à le penser ? Tant qu’il y a de l’espoir, les sang et or croiront en leur chances de qualification. Mais tant qu’ils ne joindront pas leurs actes aux discours, les supporters du club, eux, y croiront de moins en moins.
La course-poursuite de l’USAP (11e du classement) a ceci d’infernal qu’elle oblige le club à se projeter constamment vers un avenir hypothétique. « Si on gagne tous nos derniers matches, etc.» Une façon idéale de maintenir le groupe sous pression mais aussi de minimiser, voire d’évacuer, ses lacunes actuelles.
Les Catalans ne se trouvent pas si mal - belle litote -, mais à force de repousser au prochain voyage leur réveil à l’extérieur, il sera bientôt trop tard. Le chemin de la qualification pour les demi-finales d’accession au Top 14 n’a pas fini de torturer les esprits.
Trouver le salut à Aimé-Giral
Car la défaite (21-10) à Mont-de-Marsan, si elle n’a rien de déshonorant, noircit encore un peu plus l’horizon. Concrètement, Perpignan est scotché dans le bas du tableau, à 12 points de la 5e place qualificative (soit trois victoires) ou, autre regard, à six points du premier relégable.
Dans sa chronique (lire plus bas), notre consultant Pascal Meya résume parfaitement l’équation qu’ont à résoudre les Catalans ces prochaines semaines : transformer leur bien-vivre en enfer pour les autres. Une force mentale qui, désormais, dépend moins de l’entraîneur Patrick Arlettaz que des joueurs eux-mêmes. Ce dernier a, de l’avis unanime, construit un projet de jeu épanouissant. Encore faudrait-il que les acteurs s’en servent pour se transcender partout. C’est pour l’heure le cas à domicile, où l’USAP a engrangé quatre points de bonus offensifs lors des cinq derniers matches. Elle aurait même pu faire carton plein en comptant Colomiers, contre qui elle menait 22-9 à dix minutes de la fin...
La venue d’Aurillac, dimanche à Aimé-Giral, confirmera-t-elle cette tendance ? Il n’y a pas de raison d’en douter. L’USAP, elle, en a fait son bâton de maréchal, espérant tout gagner chez elle jusqu’à la fin. Ça tombe bien : le calendrier lui offre une phase retour à huit réceptions pour sept déplacements. Sur le papier, les dix dernières journées semblent effectivement de nature à la propulser vers une série de victoires.
Le potentiel de l’équipe n’est pas en cause. Son instinct de tueur si. Comment expliquer autrement le gouffre existant entre ses productions à Aimé-Giral et à l’extérieur ? En attendant, en ce mois de janvier glacial et machiavélique, on aurait juste envie d’adresser aux sang et or ce proverbe maori : « Tourne-toi vers le soleil, l’ombre sera derrière toi. »
Calendrier de la deuxième partie de saison :
1er bloc : à Mont-de-Marsan, Aurillac, à Colomiers, Carcassonne, à Bourgoin.
2e bloc : Agen, Vannes, à Albi, Montauban, à Dax.
3e bloc : Biarritz, à Narbonne, Angoulême, à Oyonnax, Béziers.
Pour Pascal Meya (Notre consultant de la semaine) : « Il faut faire sauter des verrous »
"L’USAP est engagée dans un bloc de vérité, un bloc que je qualifierais d’arithmétique, où tous les points vont compter. Si elle s’en sort bien, le printemps devrait lui sourire. Les matches de reprise sont toujours compliqués, ça s’est vu à Mont-de-Marsan, même si l’USAP n’a pas été si mauvaise que ça. Ce qui m’alerte, en revanche, c’est qu’il manque un ingrédient fondamental : le supplément d’âme qu’il faut mettre dans le jeu. Samedi, les joueurs ont clairement manqué de puissance et d’agressivité. Au bout d’un moment, le ciment de l’équipe - et des Catalans en général -, c’est cette notion d’agressivité, d’être des révoltés permanents, comme disait Gérard Majoral. Le ressort mental ne vient que s’il y a une ambition commune. Entre le dire et le faire, je me demande s’il n’y a pas trop de confort dans cette équipe. On dirait quelque part que les joueurs ne veulent pas bouger les lignes ou être transgressifs. Des mecs comme Farnoux, qui ont le niveau pour jouer au-dessus, peuvent se dire : « Je ne me contente pas de cette place (11e du classement) et de bien jouer au ballon. » Cette équipe respecte le plan de jeu d’Arlettaz et Lanta mais, à un moment, soit elle veut se protéger, soit elle ne veut pas prendre l’initiative. Or il faut qu’il y ait des verrous qui sautent. Le rugby est un sport collectif de combat, c’est maintenant aux joueurs de prendre les clés du camion et de s’approprier le plan de jeu, car c’est leur carrière qui est en jeu. Par rapport au bloc qui arrive, il va falloir avoir énormément de ressources mentales. Aujourd’hui, il leur manque cette force de caractère. Le bien-être d’une équipe, c’est quand il y a des objectifs cohérents au regard de la communication et des actes. À l’USAP, il y a beaucoup de communication mais ça manque d’actes sur le terrain. Les Montois, on ne leur a pas fait assez mal, la motivation ne semblait pas au top. En rugby, le mental n’est pas pavlovien, il ne peut pas fonctionner par ressort, sur le mode action-réaction. Il faut une motivation constante. J’admire les équipes qui vont toujours chercher le point de bonus à l’extérieur, comme Mont-de-Marsan, Brive ou Bordeaux. Ces clubs ne lâchent jamais l’affaire, c’est ce piment qui manque actuellement à l’USAP. J’ajoute une dernière chose : une équipe de rugby, ce n’est pas une équipe de copains mais des personnes qui ont un objectif commun. Qu’il y ait des liens affectifs forts, ok, mais il faut rester dans la peur et l’agressivité, car c’est cela qui rend solidaire. L’USAP doit acquérir cette dimension mentale qui permet de renverser des montagnes."
Pascal Meya, ancien pilier de l’USAP (1993-2003).