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France - Nouvelle-Zélande : l’intouchable Monsieur Galthié, sélectionneur jamais responsable de rien
L’entraîneur des Bleus, qui affrontent les All Blacks ce samedi soir (21 h 10) au Stade de France, a traversé toutes les tempêtes, sportives
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France - Nouvelle-Zélande : l’intouchable Monsieur Galthié, sélectionneur jamais responsable de rien
L’entraîneur des Bleus, qui affrontent les All Blacks ce samedi soir (21 h 10) au Stade de France, a traversé toutes les tempêtes, sportives et extra-sportives, sans être jamais remis en cause. Une immunité adossée à un contrat longue durée.Par Olivier François
Le 15 novembre 2024 à 19h19
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Fabien Galthié, le sélectionneur des Bleus qui défient les All Blacks est passé maître dans l'art de surmonter les échecs. Moins de les assumer. AFP/Anne-Christine Poujoulat
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On le disait stratège, joueur d’échecs. Sur ce plan, il a déjà failli. Son génie est ailleurs, dans l’art de passer à travers les gouttes, de sortir d’une tempête sans éclaboussure. Fabien Galthié n’est peut-être pas un grand maître des échecs mais il se joue d’eux, comme personne. Au moment d’affronter les All Blacks, ce samedi soir au Stade de France, le sélectionneur des Bleus, sous contrat jusqu’à l’été 2028, lance réellement son deuxième mandat après un Tournoi raté tout en continuant de jongler avec les phrases vides.
« On est très concentré sur la meilleure équipe de France possible du moment », a-t-il lâché jeudi à Marcoussis lors de l’annonce de la composition du XV de France. Sans rire. Aux médias et au grand public, il livre un discours abstrait, comme s’il voulait se maintenir hors de portée du commun des mortels. À ses joueurs, il réserve les paroles techniques. Mais jamais de remise en cause.
Et pourtant, il y aurait de quoi. En une année, l’homme qui a replacé le XV de France parmi les meilleures nations du rugby mondial a traversé deux séismes. Le premier, sportif, avec l’élimination de son équipe en quart de finale de la Coupe du monde le 15 octobre 2023 par l’Afrique du Sud (28-29). Un fiasco retentissant vu les moyens inédits dans l’histoire du rugby français qui lui avaient été alloués dans l’espoir d’un couronnement (42 joueurs à disposition à chaque rassemblement). « Je ne me suis absolument pas trompé », a-t-il clamé trois semaines plus tard lors d’une conférence de presse servant de débriefing.
« Il est toujours le même avec nous »
Rebelote après la désastreuse tournée, en termes d’image, du XV de France en Argentine au mois de juillet dernier, marquée par les dérives alcoolisées d’une partie des joueurs et du staff, les propos racistes de Melvyn Jaminet et les mises en examen pour viol d’Hugo Auradou et Oscar Jegou. « Je n’ai surtout pas pensé à démissionner, a-t-il répété deux fois dans une interview donnée à L’Équipe avant la tournée d’automne. Je ne me sens pas fragilisé. »À lire aussi« C’est le XV de France ou le Club Med ? » : après l’affaire Jegou-Auradou, la responsabilité du staff en question
Responsable de rien donc. « Et pourtant si, il l’est, affirme son ami Denis Charvet, consultant sur RMC. Coupable, non, mais responsable, oui. C’est comme ça quand on est manager. » Un avis qui n’est pas partagé par Florian Grill, le président de la Fédération française, réélu le 19 octobre dernier et peut-être un peu contraint par la prolongation de contrat en béton signé par Galthié avec son prédécesseur Bernard Laporte. « Fabien n’est pas plus responsable que qui que ce soit », l’a-t-il défendu dans nos colonnes.
À 55 ans, l’ancien coach du Stade Français, de Montpellier puis de Toulon travaille donc en toute impunité, se permettant même d’aller accueillir Hugo Auradou et Oscar Jegou, dont le non-lieu demandé n’a pas été encore prononcé, à leur retour d’Argentine. Sans y voir quoi que ce soit de choquant. Sollicité avant le début de la tournée, le sélectionneur n’a pas souhaité répondre à nos questions.
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Aurait-il changé, ne serait-ce qu’un minimum ou modifié tout du moins ses rapports avec son groupe après ces « expériences douloureuses » ? « Non, répond Gaël Fickou. Il est toujours le même avec nous. Il n’y a rien de différent. La seule chose, c’est qu’il essaie d’apporter des innovations techniques comme le grand écran sur le terrain d’entraînement par exemple. » « La seule chose qui a changé, c’est qu’il a une moustache maintenant, souligne Max Guazzini, l’ancien président du Stade Français, un proche depuis 33 ans. C’est comme ses lunettes. Je ne sais pas pourquoi il a besoin de ça, de se montrer comme ça. »
L’exemple n’est pas toujours venu d’en haut
C’est donc un sélectionneur à grosses montures et fine moustache qui s’est retrouvé fin août au cœur des États Généraux voulus par Florian Grill et qui a participé à l’élaboration de la charte imposée aux joueurs, resserrant le cadre de vie et chassant l’alcool jusqu’à interdire la moindre bière dans les vestiaires. Des images remontent alors en surface. Celles de la mise en scène fin décembre 2019 sur France Télévisions de la tournée de Fabien Galthié, qui prenait alors ses fonctions, au sein des clubs, présentant aux candidats au XV de France son « cadre de vie ».« On doit être exemplaire pour être candidat en équipe de France. On peut faire la bringue, c’est même très important, mais il faut la cadrer, on ne peut pas faire n’importe quoi. » La réaction du Racingman Wenceslas Lauret réclamant de la cohérence et d’éviter les non-dits, plus sélectionné ensuite pour ne pas avoir courbé l’échine, avait quelque chose de prémonitoire.
L'effectif a accepté le nouveau « cadre de vie » voulu par la fédération. Une charte qui inclus le staff, et donc Fabien Galthié lui-même. AFP/Anne-Christine Poujoulat
Si l’effectif aujourd’hui a tout accepté en bloc, il a surtout salué le fait que le staff ait été inclus dans la charte. En coulisse, des joueurs n’ont cependant pas fait preuve du même enthousiasme. Certains d’entre eux ont même tenté de faire jouer leurs relations afin d’infléchir les règles. C’est que l’exemple n’est pas toujours venu d’en haut, loin de là.
80 % de victoires, oui, mais 20 % de Tournois remportés
Faut-il rappeler que le premier pacte a d’ailleurs été rompu par… Fabien Galthié, lui-même. En pleine période Covid, en février 2021, le sélectionneur avait percé la bulle sanitaire qui entourait Marcoussis pour une escapade personnelle alors que le XV de France, à l’époque, bénéficiait d’une dérogation gouvernementale pour disputer le Tournoi des Six Nations. Le virus s’était parallèlement propagé au sein de son groupe (17 cas positifs) sans que le sélectionneur ne soit considéré comme le patient zéro.Menée par le professeur Roger Salamon, l’enquête interne de la FFR avait « exonéré de tout » Galthié, ciblant un joueur de l’équipe de France à 7 et rassurant au plus vite le ministre de tutelle Jean-Michel Blanquer, prompt à voler à son secours au nom de l’intérêt suprême du XV de France. Et au diable l’éthique de comportement. En interne, les dents avaient grincé, fort, face aux libertés que le sélectionneur s’était octroyées au mépris de la santé des joueurs et de leurs entourages.
Mais voilà donc un honneur tout neuf, un homme serein, un entraîneur protégé, parti sur une route sans péage à la poursuite de son graal, le titre mondial en 2027 en Australie, et brandissant sans cesse, comme un bouclier, les 80 % de victoires du XV de France sous sa direction. Mais oubliant qu’avec lui, les Bleus n’ont remporté qu’un seul Tournoi des Six Nations (le Grand Chelem en 2022) en cinq éditions. Cela fait 20 %. Une autre façon de voir les chiffres…